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définitions

accuser (v. trans.)

1.désigner qqn comme coupable.

2.faire ressortir avec force, d'une manière particulièrement visible.

3.déférer un individu coupable d'une infraction ou d'un crime devant un tribunal répressif.

4.blâmer (qqn), faire une allégation d'acte répréhensible ou de mauvaise conduite contre (qqn) "il a accusé le directeur d'indifférence"

5.déposer plainte contre ; porter une accusation contre " Les voisins ont accusé l'homme de violence conjugale "

6.accuser formellement de crime ou de délit

Le Littré (1880)

ACCUSER (v. a.)[a-ku-sé]

1. Imputer un crime à quelqu'un. Il fut accusé de brigue, de violence. Accuser quelqu'un d'un crime capital. On l'accusa d'avoir fui du combat. Socrate fut accusé de nier les dieux que le peuple adorait.

Pour vous justifier du crime dont ma raison vous accusait.... (MOL. Fest. de Pierre, I, 3)

Je n'accuse personne et vous tiens innocent (CORN. Rod. V, 4)

Ce n'est pas qu'après tout tu doives épouser Celui qu'un père mort t'obligeait d'accuser (CORN. Cid, IV, 2)

D'un amour criminel Phèdre accuse Hippolyte (RAC. Phèd. IV, 2)

Je le crois criminel, puisque vous l'accusez (RAC. ib. V, 7)

2. Dans le droit criminel actuel, poursuivre, en vertu d'un arrêt de la chambre des mises en accusation, une personne devant la cour d'assises.

3. Accuser un acte faux, soutenir qu'un acte est faux.

Cette locution a vieilli. On dit présentement, arguer un acte de faux.

4. En général, imputer, reprocher.

Tu pouvais, pour toi, m'accuser de froideur (MOL. l'Étour. I, 6)

Il l'avait accusé de discours médisants (MOL. ib. III, 5)

Quand vous devez la vie aux soins de ce grand homme, Vous osez l'accuser d'avoir trop fait pour Rome (VOLT. Catil. V, 1)

Ah ! si nous périssons, n'en accusez que vous (RAC. Baj. II, 3)

La vie n'était pour lui qu'un esclavage et une triste captivité ; et sans en accuser la Providence ni s'en plaindre.... (BOURD. Pensées, t. I, p. 45)

5. Gourmander, blâmer.

D'Egmont.... De l'incertain Mayenne accusait la lenteur (VOLT. Henr. VIII)

Mais avec quel courroux, avec quelle tendresse Mahomet de mes sens accusa la faiblesse ! (VOLT. Fanat. IV, 3)

Contre l'effort des vents ces myrtes sans appuis Accusent notre indifférence (C. DELAV. Paria, II, 5)

N'accuse point mon sort ; c'est toi seul qui l'as fait (CORN. Cinna, III, 4)

Par des ambassadeurs accuser ma paresse (RAC. Mithr. III, 1)

Où donc est ce grand coeur dont tantôt l'allégresse Semblait du jour trop long accuser la paresse ? (BOILEAU Lutr. II)

.... En vain de ton départ Les tiens impatients accusent le retard (DELILLE Énéide, III)

6. En parlant des choses, servir de preuve, d'indice. Le fait même l'accuse.

Devant les dieux vengeurs, mon désespoir m'accuse (VOLT. Sémir. I, 5)

Voyons qui son amour accusera des deux (RAC. Mithr. III, 4)

Et son silence même accusant sa noblesse Nous dit qu'elle nous cache une illustre princesse (RAC. Iph. I, 2)

Caché sous des lambeaux, un reste de richesse Semble encor de son rang accuser la noblesse (DUCIS Lear, II, 2)

7. À certains jeux de cartes, accuser son jeu, en faire connaître ce que les règles veulent qu'on déclare.

8. Accuser juste, accuser faux, être exact, inexact dans son récit.

Chamillart convenait que Catinat accusait vrai en tout et partout (SAINT-SIMON 105, 120)

La renommée accuse juste en contant ce que vous valez (MOL. Préc. 10)

9. Accuser une douleur, accuser son âge, dire qu'on sent une douleur, qu'on a tel âge.

10. Accuser la réception ou accuser réception d'une lettre, d'un paquet.

M. Plet ne nous accusa ni la réception de cette lettre ni celle d'un assez gros paquet que je lui avais adressé (VOLT. Lettr. Prusse, 35)

Je n'ai de temps que pour en accuser la réception (BOSSUET Lettr. Quiét. 190)

La plupart commencent par accuser la réception de ma lettre (SÉV. 243)

11. En termes de peinture, faire sortir certaines parties qui sont recouvertes par quelque enveloppe. Accuser les muscles, les os.

12. S'accuser, v. réfl. Se dire coupable. Il s'accuse d'homicide. S'accuser d'une faute, de sa crédulité. Elle s'accusait de ralentir ma marche.

Vientelle s'accuser et se perdre elle-même ? (RAC. Ph. III, 6)

Votre coeur s'accusait de trop de cruauté (RAC. Brit. IV, 3)

Je m'accuse, moi-même, d'en avoir trop entendu (MOL. Festin de pierre, I, 3)

Je me suis accusé de trop de violence (CORN. Cid, III, 4)

13. S'accuser, déclarer ses péchés au prêtre dans la confession. S'accuser d'avoir rompu le jeûne.

REMARQUE

Régnier a dit : Un rêveur m'accuse Que je ne suis pas net.... Sat. II. Cette tournure est insolite, et l'on dit d'habitude de avec l'infinitif : De n'être pas net. Cependant elle n'a rien qui soit fautif en soi.

HISTORIQUE

XIIe s.S'aucuns est acuseis qu'il ait aucun ochis.... (TAILLIAR Recueil, p. 491)Et feissent deux homes avant venir, qui Naboth acusassent et sur lui testemoniassent que il out mesparlé de Deu meïme et del rei (Rois, 331)

XIIIe s.Cil cui je n'avoie riens mesfait, m'acusoient (Psautier, f. 48)Par iceste maniere bien nous acuserons [nous prouverons notre fait] (Berte, 23)Qui est accusé de cas de crieme, il ne se puet defendre par procureur (BEAUMANOIR 80)En cas de crieme dont on pot perdre vie ou membre, li acusés n'est pas tenus à jurer, se li cas n'est de gages (BEAUMANOIR XX, 9)Li mariages fu après acusés, et fu depeciés [cassé], et fut tenu por malvès (BEAUMANOIR XVIII, 18)Tretout ansinc vous dis pour voir [vrai] Que li cristal, sans decevoir, Tout l'estre du vergier accusent à ceux qui dedans l'iaue musent (la Rose, 1569)

XIVe s.Et encore eüst on tout occis et tué, S'il n'eüssent nommé l'englois et accusé Qui les armes pendi de Bertran l'aduré (Guesclin, 19767)Dame, dist Galerans, jà n'aie je pardon, Se je vous en accuse par nulle entention (Baud. de Seb. II, 90)

XVIe s.Ils ne nous accusoient [dénonçaient] jamais aux ennemys (CARLOIX V, 6)Ceux qui accusent les hommes de.... (MONT. I, 11)Les vieux du Senat accuserent [blâmèrent] cette pratique (MONT. I, 23)Les mesmes paroles qui accusent [indiquent] ma maladie (MONT. I, 34)

ÉTYMOLOGIE

Provenç accusar ; espagn. acusar ; ital. accusare ; de accusare, de ad, à, et d'un radical sur lequel on a varié. Priscien dit que ce radical est cusare, fréquentatif de cudere, qui veut dire forger. Mais il est plus vraisemblable de le rattacher à causa, cause (voy. ce mot). Ce qui ajoute quelque probabilité à cette étymologie, c'est que Bède dit que accusare s'est aussi écrit avec deux ss, orthographe qui est aussi celle de causa, caussa.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

ACCUSER. - REM. Ajoutez :

2. Accuser réception a été créé par Balzac, d'après GÉNIN, Variat. p. 315.