définitions
aigre (adj.)
1.d'une acidité désagréable.
2.aigu, pour un son.
3.qui a un goût acide, aigre; suret.
4.piquant, aigre, amer.
5.(figuré)acerbe, acrimonieux.
6.(figuré)qui est très vif, que l'on ressent fortement, pour le froid.
aigre
1.(Cismef)Acide, âcre.
Le Littré (1880)
AIGRE (adj.)[è-gr']
1. Qui a une acidité déplaisante. Vin aigre ; fruits aigres.
2. Qui a l'odeur du vinaigre. Ce bouillon a une odeur aigre.
3. Perçant, désagréable, en parlant des sons et de la voix. Cet instrument, cette cloche a un son aigre. Sa voix est aigre.
• Tel un coursier qu'amour vient assaillir, Mort pour la gloire, entend sans tressaillir L'aigre clairon qui l'appelle aux alarmes (MILLEV. Emma et Eginard.)
4. Fig. L'air, le vent est aigre, il n'est pas doux.
5. En termes de peinture, couleurs aigres, couleurs mal accordées ; tons aigres, tons qui ne sont pas fondus.
6. Fer, cuivre aigre, fer, cuivre non ductile, non malléable.
7. Au moral, fâcheux, désagréable. Rien de plus aigre que votre soeur. Aigres réprimandes. Railleries aigres.
• Ces supérieures brusques dans leurs manières, sèches dans leurs paroles, aigres dans leurs réprimandes, fâcheuses dans leurs humeurs (BOURD. Pensées, t. II, p. 471)
• Il n'y a guère de gens plus aigres que ceux qui sont doux par intérêt (VAUVENARGUES. Max. 54)
• Ce qui rend mon mal plus aigre et plus cuisant (RÉGNIER Plainte.)
• Dans vos discours chagrins plus aigre et plus mordant Qu'une femme en furie ou Gauthier en plaidant (BOILEAU Sat. IX.)
• Mais Evrard, en passant coudoyé par Boirude, Ne sait point contenir son aigre inquiétude (BOILEAU Lutr. V)
8. S. m. Un goût, une odeur d'aigre. Cela sent l'aigre.
9. Fig. Il y a encore de l'aigre dans l'air, la température n'est pas encore adoucie.
10. Aigre de cèdre, le jus de citrons ou de cédrats à demi mûrs, préparé aux environs de Gênes, non pour en faire des sorbets, mais pour l'usage des parfumeurs.
SYNONYME
AIGRE, ACIDE, ACERBE. Au propre, ces trois mots désignent une impression particulière du goût. Ils se distinguent nettement ; et, comme dit M. Lafaye, ce qui est aigre n'est plus doux, ce qui est acide n'est pas doux, ce qui est acerbe n'est pas encore doux. Aigre indique une saveur qui provient de quelque altération : du lait aigre ; du vin aigre ; aussi est-elle toujours désagréable. Acide indique une saveur franche, spontanée : la groseille est un fruit acide. Acerbe indique la saveur qui appartient aux fruits non mûrs : la nèfle sur laquelle la gelée n'a pas passé est acerbe. Au moral acide n'est pas employé ; il ne reste que aigre et acerbe. La distinction qui existait au physique continue : des paroles aigres sont dictées par le ressentiment, la mauvaise humeur ; des paroles acerbes le sont par l'âpreté naturelle de la personne qui parle. Des paroles aigres sont plus piquantes ; des paroles acerbes sont plus âpres et plus dures.
HISTORIQUE
XIIe s.— Par plus aigre main de penitence (Job, 460)
XIIIe s.— Cil qui sont regratier de cervoises vendre, ne les vendent pas si bones ne si loiaus, come cil qui les font en leur hostieuz, et les vendent aigres et tournées, quar il ne les scevent point metre à point (Liv. des Mét. 30)— Tu es moult egres, si es fort Par menaces, mes petit vaut Tes povoirs à un poi d'asaut (Ren. 16714)
XIVe s.— Et le vicieux qui deffaut en ceste matiere est appelé aigre, agreste et dur (ORESME Eth. 138)
XVe s.— En eulx avoit Dieu aigres et beaux champions, et le monde confort (G. CHASTEL Chr. du duc Phil.)— Le roy retourna en santé.... et lui exposa on bien les manieres qu'avoient tenu ses parens.... et plusieurs autres choses les plus aigres que faire se pouvoient (JUVÉN. Charles VI, 1411)— Le comte de Hainaut, qui trop durement avait pris cette guerre en coeur, et qui estoit plus aigre que nul des autres (FROISS. I, I, 138)— Le seigneur de Jumont, qui moult estoit aigre chevalier et expert sur les ennemis (FROISS. III, IV, 50)
XVIe s.— Avoyt il mangé prunes aigres sans peler ? Avoyt il les dens esguassées ? (RAB. Pant. IV, nouv. prol.)— Plus ne paistrez le trefle fleurissant, Ne l'aigre feuille au saule verdissant (MAROT IV, 7)— Ils penserent que cette sorte de vengeance debvoit estre plus aigre que la leur (MONT. I, 240)— Tout ainsi que l'ennemy se rend plus aigre à nostre fuitte (MONT. I, 305)— Ce bruit aigre et poignant que font les limes (MONT. II, 367)— Aigres sont choses qui se cassent aisement avec un marteau (PALISSY 377)— Lors le fer devenoit si aigre et si esclatant, que l'on ne pouvoit plus battre ne forger (AMYOT Lyc. 13)— Desguiser les viandes avec quelque saulse aigre et picquante (AMYOT Anton. 29)— L'abeille trouve naturellement es plus aigres fleurs et parmy les plus aspres espines le plus parfaict miel et le plus utile (AMYOT Com. lire les poëtes, 49)
ÉTYMOLOGIE
Provenç. et catal. agre ; ital. agro ; du latin acer ; en grec, pointu, de pointe. Comp. acier (voy. aussi ÂCRE). Dans l'ancien français aigre a souvent le sens de actif, vaillant, comme acer en latin.