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définitions

ménager (v. trans.)

1.ménager; prendre grand soin de.

2.utiliser avec prudence et parcimonie "J'essaie d'économiser mon temps libre" "conserver son énergie pour l'ascension vers le sommet"

ménager (adj.)

1.relatif aux questions de la maison ; qui concerne le ménage et son entretien.

2.qui concerne le ménage et son entretien.

3.qui implique le foyer ou la famille " soucis domestiques " " bonheur domestique " " ils partagent les tâches ménagères " " tout semblait très paisible et domestique "

Le Littré (1880)

MÉNAGER (v. a.)[mé-na-jé. Le g prend un e devant a et o : ménageais, ménageons]

1. Employer, dépenser avec économie, comme on fait dans un ménage bien conduit. Il ménage bien son revenu. Il ménage tout ce qu'il peut dans sa maison.

Il entre dans tout.... et veut que le marquis ménage lui-même son argent, qu'il écrive, qu'il suppute, qu'il ne dépense rien d'inutile (SÉV. 10 déc. 1688)

Je ménagerai votre bourse, ne vous mettez pas en peine (REGNARD Sérénade, sc. 7)

Absolument. Il ménage pour l'avenir, pour sa vieillesse, pour ses enfants.

Par extension.

Je ne reçois [à Nantes] vos lettres que deux jours plus tard qu'à Paris ; c'est tout ce qu'on peut ménager sur une distance aussi extrême que celle-ci (SÉV. 25 mai 1680)

Fig. Ménager ses paroles, parler peu.

Ménager ses pas, éviter de faire des démarches, en faire le moins qu'on peut.

2. Économiser, épargner, comme on épargne dans un ménage.

Elle [Rome] ménageait ses forces contre un ennemi qui venait des bords de l'Afrique, que le temps devait détruire tout seul dans un pays étranger (BOSSUET Hist. III, 6)

Aussi capable de ménager ses troupes, que de les pousser dans les hasards (BOSSUET Louis de Bourbon.)

On croit qu'il expose ses troupes : il les ménage en abrégeant le temps des périls par la vigueur des attaques (BOSSUET ib.)

Il n'y a rien que les hommes aiment mieux à conserver et qu'ils ménagent moins que leur propre vie (LA BRUY. XI)

Et prodigues d'un sang qu'ils devraient ménager (VOLT. Zaïre, III, 1)

Ne pas abuser de, conserver pour soi.

Vous avez un ami riche qui vous donne des repas ; ménagez bien cette bonne fortune (SÉV. 1er août 1685)

3. Fig. Conduire comme on conduit le ménage d'une maison, manier, diriger.

Ménagez cela suivant cette politique dont vous me donnez des leçons (SÉV. à Guitaut, 9 avr. 1683)

Un homme qui, pour ne pas irriter la haine publique déclarée contre le ministère, sût se conserver de la créance dans tous les partis et ménager les restes de l'autorité (BOSSUET le Tellier.)

Il relève le courage des alliés, il ménage la foi suspecte et chancelante des voisins (FLÉCH. Turenne.)

Après avoir été à la tête des affaires et ménagé le destin de Rome (MASS. Or. fun. Villeroy.)

Absolument.

Je ne m'endors pas auprès de Mme de Coulanges.... mais il faut ménager longtemps avant que d'entreprendre quelque chose d'utile (SÉV. 13 nov. 1673)

Fig. Préparer avec adresse, avec mesure.

Souffrez que je ménage un moment de retraite (CORN. Agésil. II, 1)

Un auteur qui avait trois épîtres toutes prêtes pour un même livre, pour trois personnes fort différentes en condition et en mérite, ayant résolu d'employer celle dont il pourrait tirer le plus d'utilité, et faisant ménager cela par une tierce personne (Mlle DE SCUDÉRY les Conversations, Dialogue.)

L'éléphant devait sur son dos Porter l'attirail nécessaire,... L'ours s'apprêter pour les assauts ; Le renard ménager de secrètes pratiques ; Et le singe amuser l'ennemi par ses tours (LA FONT. Fabl. V, 19)

Certains loisirs qu'il sait fort bien ménager (SÉV. 19 janv. 1674)

Ménagez, s'il est possible, quelques jours avant la communion, un entretien avec votre confesseur, afin qu'il vous aide par ses conseils à bien faire une action si sainte (BOURDAL. Instruct. sur la commun. exhort. t. II, p. 455)

Or, je vous le demande, quels ont pu être les desseins de la miséricorde de Dieu en vous ménageant des spectacles si effrayants ? (MASS. Carême, Impén. fin.)

Toutes les facilités de salut que la bonté de Dieu lui avait ménagées (MASS. Carême, Mauv. riche.)

Le cardinal Mazarin ménageait cette célèbre paix de Munster, par laquelle les Français et les Suédois furent les législateurs de l'Empire (VOLT. Hist. parlem. ch. LV)

Platon s'était rendu en Sicile, dans le dessein de ménager une réconciliation entre Dion et le roi de Syracuse (BARTHÉL. Anach. ch. 33)

4. Ménager de ou que, faire adroitement en sorte que.

Nous en revenons toujours à ménager qu'au moins il [Ch. de Sévigné] ne fasse pas un marché extravagant [en vendant sa charge] (SÉV. 29 mars 1680)

Nous ménageons.... de lui faire faire une bonne confession (SÉV. 27 avr. 1671)

Notre grande affaire, c'est de savoir nous concilier la miséricorde divine, c'est de ménager qu'un Dieu nous pardonne, et de faire que sa clémence arrête le cours de sa colère (BOSSUET Sermons, Justice, 3)

5. Fig. Employer avec habileté et mesure.

....Elle est et belle et fine, Et sait si dextrement ménager ses attraits Qu'il n'est pas bien aisé d'en éviter les traits (CORN. Gal. du Pal. I, 9)

Si dans l'occasion je ménage un peu mieux L'assiette du pays et la faveur des lieux (CORN. Sertor. III, 2)

Allez, mon Père, votre ordre [les jacobins] a reçu un honneur qu'il ménage mal : il abandonne cette grâce qui lui avait été confiée (PASC. Prov. II)

Elle aimait mieux employer son crédit pour les intérêts des autres, que de le ménager pour les siens propres (FLÉCH. Mme de Mont.)

Son adroite vertu ménage son crédit (RAC. Brit. IV, 4)

Ménager un terrain, une étoffe, les employer si bien, qu'on en fasse tout ce qu'on en veut faire, et qu'il n'y ait rien de perdu.

Ménager le temps, ménager son temps, ménager les moments, ne pas les perdre, en faire bon emploi.

Par le travail on charmait l'ennui, on ménageait le temps.... (BOSSUET Anne de Gonz.)

Elle [la reine] ménageait si bien son temps que, sans retarder les desseins du roi, elle avait toute la complaisance qu'une femme doit à son époux, et toute la fidélité qu'une chrétienne doit à Dieu (FLÉCH. Mar.-Thér.)

Ménageons les moments que ce transport nous laisse (RACINE Andr. V, 5)

Si vous aimez la vie, ménagez le temps ; car c'est l'étoffe dont elle est faite (Mot de Franklin)

Ménager l'occasion, les occasions, préparer le moment, la circonstance favorable pour faire quelque chose.

Ce chanteur ménage bien sa voix, il la conduit bien, il en tire tout le parti qu'elle permet.

On dit aussi dans un autre sens : ce chanteur ménage sa voix, il ne la donne pas toute.

Ménager sa santé, en user avec prudence, avec circonspection.

6. Ménager une chose à quelqu'un, la lui procurer, la lui réserver.

Vous aviez sans doute ordonné à vos peintres de vous ménager le plaisir de la surprise (MAINTENON Lett. à la duch. de Savoie, 1696, t. II, p. 215, dans POUGENS.)

Il ménage à l'esprit des espèces de repos que tout écrivain qui veut être lu et goûté doit avoir soin de placer de distance en distance, surtout s'il écrit pour des Français (D'ALEMB. Éloges, l'abbé Dubos.)

L'entreprendre sans succès, c'est lui ménager un triomphe (BEAUMARCH. Mère coupable, V, 4)

Se ménager une chose, se la procurer, se la réserver. Se ménager des ressources pour l'avenir.

M. de Montmort se ménagea encore un secours très utile ; il s'associa M. Nicole, jeune homme qui avait déjà quelque teinture de géométrie (FONTEN. Montmort.)

Dès que nous aspirons à nous ménager leur faveur [des grands], il faut commencer par ménager leurs faiblesses, MASS., Confér. Zèle contre les scandales. Les situations que nous nous ménageons à nous-mêmes (MASS. Mystères, Soumission)

Un siècle où toute la fermeté semble se réduire à ne pas se ménager soi-même des occasions de lâcheté (ID. Or. fun. Villars.)

Tel était l'asile que je m'étais ménagé, et où je résolus d'aller m'établir en quittant le val de Travers (J. J. ROUSS. Confess. XII)

7. Arranger graduellement.

Ses amis ont résolu de lui ménager cette nouvelle, pour empêcher que le chagrin ne le fasse mourir (FÉN. Solon.)

Si j'ai bien ménagé ma gradation, loin de s'effrayer au dernier masque, il [l'enfant] en rira comme du premier (J. J. ROUSS. Ém. I)

8. Disposer. Ce poëte a bien ménagé les incidents de son épopée, de sa tragédie, de sa comédie. Ce peintre a bien ménagé l'ombre et la lumière dans son tableau.

Ménager un escalier dans un bâtiment, un cabinet dans un appartement, etc. faire en sorte qu'il s'y trouve de la place pour un cabinet, un escalier, etc. sans gâter le dessin principal.

Dans le plancher du portique est ménagée une trappe par laquelle les castors descendent au bain (CHATEAUB. Amér. Hist. nat. castors.)

On dit dans le même sens : ménager un jour dans une maison, une issue dans une clôture.

9. Ménager une personne, l'esprit d'une personne, obtenir adroitement une certaine influence sur ses volontés, se conduire adroitement avec elle.

Ou par vous, ou par lui, ménagez bien le père (CORN. Suiv. III, 4)

L'abbé de Grignan a si bien ménagé M. de Paris [l'archevêque], que le coadjuteur en sera reçu [à l'assemblée du clergé] comme un député très agréable et très cher (SÉV. 31 mai 1675)

Jules Mazarin.... s'était donné à la France, et, propre par son génie et par ses correspondances à ménager les esprits de sa nation.... (BOSSUET le Tellier.)

Quelques chefs qu'il avait soigneusement ménagés (BOSSUET Hist. I, 6)

C'est un homme à ménager pour défendre l'autorité du saint-siége (BOSSUET Lett. quiét. 197)

Il eut le soin de ménager l'esprit de son oncle (HAMILT. Gramm. 7)

Je voudrais ménager ces deux femmes, de façon que l'une ou l'autre ne pût me manquer (PICARD Collatéral, IV, 7)

Traiter avec égard, de manière à ne point offenser, à ne point déplaire.

Ne savez-vous pas bien pourquoi je le ménage ? (MOL. Mis. II, 1)

Aujourd'hui toutefois, sans trop le ménager [un homme entiché de sa noblesse], Sur ce ton un peu haut je vais l'interroger (BOILEAU Sat. V)

Mais de nos alliés ne vous séparez pas, Ménagez-les, seigneur (RAC. Alex. I, 3)

Nous lui laissons un maître, il le doit ménager (RAC. Andr. IV, 1)

Personnes puissantes qu'on a besoin de ménager (FÉN. Tél. XXIV)

Le pape élu avait à ménager à la fois le sénat romain, le peuple et l'empereur (VOLT. Moeurs, 30)

Le vrai courage est celui qui combat les ridicules et les vices, ménage les personnes et obéit aux lois (D'ALEMB. Essai sur la soc. des gens de lettres, Oeuv. t. III, p. 92, dans POUGENS.)

Il se dit des choses, dans un sens analogue.

Il n'y eut point dans son esprit de faiblesse à ménager (FLÉCH. le Tellier.)

Il faut ménager votre honneur (FÉN. Tél. XII)

C'est une lâche timidité qui n'ose s'élever contre les préjugés communs et qui ménage plus les suffrages frivoles des hommes que leurs intérêts sérieux et éternels (MASS. Confér. Zèle contre les scandales)

La critique s'exerce sur l'ouvrage, et non sur la personne : elle ne doit ménager aucun défaut, si elle veut être utile (VOLT. Comment. Corn. Rem. Sertor. préf.)

Ménager les préjugés, c'est manquer à la vérité ; ménager les vices, c'est rougir de la vertu (DIDER. Claude et Néron, II, 38)

Ménage ma douleur (VOLT. Tancr. IV, 6)

Entraînons-le [le peuple] à la guerre, et, sans rien ménager, Succédons à César en courant le venger (VOLT. M. de César, III, 8)

Il ménageait toutes les faiblesses, il n'en avait aucune (MARMONTEL Mém. XI)

Ménager les termes, les expressions, parler avec une grande circonspection.

Le duc ne ménageait point les termes (SÉV. 535)

N'avoir rien à ménager avec quelqu'un, n'avoir plus de mesure à garder avec lui.

Fig. Ménager la chèvre et le chou, voy.

CHÈVRE

; la locution est aussi : sauver la chèvre et le chou, et vient d'un ancien conte où il s'agit de sauver la chèvre du loup et le chou de la chèvre.

10. Préserver du dommage.

Je ne veux point dire ce que M. de Chaulnes m'a mandé [dans les troubles de Bretagne].... et comme il ménage [la terre de] Sévigné, qui est aux portes de Rennes (SÉV. 27 oct. 1675)

Ménager les intérêts de quelqu'un, avoir soin de les conserver, de ne pas les compromettre.

11. Ménager quelqu'un, user modérément des avantages qu'on peut avoir sur lui. Vous êtes plus fort que lui, ménagez-le.

Il a passé l'âge où l'on se corrige ; il n'y a donc plus qu'à le ménager (MARMONTEL Cont. mor. Connaiss.)

La douleur est déjà dans mon coeur, ménagez-moi (STAËL Corinne, IV, 6)

Ménager quelqu'un, signifie aussi ne pas mal parler de lui.

Rappelez en votre mémoire, avec quelle circonspection elle ménageait le prochain, et combien elle avait d'aversion pour les discours empoisonnés de la médisance (BOSSUET Reine d'Anglet.)

12. Ménager un cheval, être attentif à ne point le fatiguer.

13. Se ménager, v. réfl. Être procuré, arrangé.

Il semble que le mariage de Mlle de Laval se ménage avec M. de Roquelaure (SÉV. 11 mai 1683)

Se développer graduellement.

Nous voulons qu'avec art l'action [d'un poëme dramatique] se ménage (BOILEAU Art p. III)

14. Avoir soin de sa personne, de sa santé.

Vous m'aviez tant promis de vous ménager que je comptais un peu plus sur les paroles que vous m'en aviez données (SÉV. 417)

Elle [Mme de Guitaut qui venait d'accoucher] ne s'est non plus ménagée sur le bruit que si elle était reine ou Dauphine, c'est tout dire (SÉV. 26 mai 1681)

Ceux qui le priaient de se ménager (FLÉCH. Lam.)

Vous ne vous êtes pas ménagé pour le plaisir (MASS. Carême, Resp. hum.)

Ménagez-vous, sire, et conservez-vous pour vos peuples (D'ALEMB. Lett. au roi de Prusse, 14 nov. 1776)

Nous avons nombre d'exemples d'hommes qui ont vécu cent dix ans et même cent vingt ans ; cependant ces hommes ne s'étaient pas plus ménagés que d'autres (BUFF. De la vieillesse et de la mort)

15. S'observer, user de retenue.

Je me ménage [pour ne pas trop parler de Mme de Grignan] selon les lieux, les temps et les personnes avec qui je suis (SÉV. 6 janv. 1672)

16. Avoir des égards, des ménagements les uns pour les autres.

L'empereur et le pape se ménagent l'un l'autre (VOLT. Ann. Emp. Frédéric 1er, 1155)

On se ménagera davantage quand on aura plus de raisons de se ménager (J. J. ROUSS. Lett. à d'Alemb.)

17. Se conduire avec adresse, avec circonspection.

Vous me peignez fort plaisamment les manières dont elle s'est ménagée pour éviter de s'engager (SÉV. 31 déc. 1684)

L'âge viril.... Se pousse auprès des grands, s'intrigue, se ménage (BOILEAU Art p. III)

Il trouve de grandes difficultés pour se ménager parmi tant de rois jaloux (FÉN. Tél. XVI)

Dans les occasions où il s'agit de se déclarer pour lui [Dieu], on mollit et on se ménage (MASS. Myst. Pentec.)

Ne pas se ménager, n'avoir aucune modération, aucune retenue.

Ils emploient les voies les plus injustes et ne se ménagent sur rien (MASS. Panég. St Thom.)

PROVERBE

Qui veut aller loin ménage sa monture

, c'est-à-dire il faut éviter les excès ; il faut user avec ménagement des choses dont on veut se servir longtemps.

Qui veut voyager loin ménage sa monture (RAC. Plaid. I, 1)

HISTORIQUE

XVe s.Guesclin menagea si bien les choses, qu'elles alloient de pair entre les deux parties, Mém. s. du G. ch. 6. La bonne femme qui menageoit [faisait le ménage] par leans, en sa main tenant un ramon [balai], demande.... (LOUIS XI Nouv. I)

XVIe s.Pour mesnager d'une pierre deux coups (MONT. IV, 318)Prens envie de sçavoir mesnager parfaitement ce que nous avons (LA BOÉTIE 174)Aiant les levres sur son oreille et mesnageant ma voix, lui respondoit souvent : que dis-tu ? (D'AUB. Hist. III, 285)De tel nom [ménage] est derivé le verbe mesnager, dont nous disons mesnager la santé, mesnager l'amitié, la faveur, la prosperité, l'occasion, le temps, le loisir, le plaisir (O. DE SERRES 808)

ÉTYMOLOGIE

Ménage.

MÉNAGER, ÈRE (adj.)[mé-na-jé, jè-r']

1. Qui entend le ménage.

Il faut, par exemple, que la raison nous rende ménagers de notre bien et de notre confiance, et il faut au contraire que la nature nous donne la bonté et la valeur (LAROCHEFOUCAULD. Max. 365)

Économe.

Loin d'ici ces personnes ménagères qui ont reçu beaucoup et qui donnent peu (FLÉCH. Panég. II, 322)

Elle trouvait honteux que l'avarice n'eût point de bornes, que le luxe se répandît en superfluités infinies, et qu'il n'y eût que la charité qui fût ménagère et resserrée (FLÉCH. Aiguillon.)

Les Syriens sont industrieux, patients, laborieux, propres, sobres et ménagers (FÉN. Tél. III)

Je serai au comble de ma joie, si je vous vois enfin ménagères, pauvres en esprit, et épargnant pour donner, comme les avares épargnent pour amasser (MAINTENON Lett. à Mme de R. 11 oct. 1693)

Fig.

Le sage est ménager du temps et des paroles (LA FONT. Fabl. VIII, 26)

On doit être ménager des moyens que la nature nous donne (MONTESQ. Esp. VI, 12)

2. S. m. et f. Ménager, ménagère, celui, celle qui entend le ménage. Elle est bonne ménagère.

La ménagère eut les coiffeuses (LA FONT. Fabl. II, 20)

Une ménagère des champs peut être une femme charmante, aussi pleine de grâces, et de grâces plus touchantes, que toutes les petites maîtresses (J. J. ROUSS. Hél. 2e préf.)

La sage ménagère à ses humbles foyers Ranime en haletant la flamme qui sommeille (DELILLE Énéide, VIII)

Celui, celle qui est économe.

Et puis l'un [refuser un bienfait demandé] est le trait d'un mauvais homme, et l'autre [prêter une petite somme à quelqu'un qui n'est pas sûr] d'un mauvais ménager (MALH. le Traité des bienf. de Sénèque, IV, 33)

Fig.

J'apprends partout que vous [un militaire] n'êtes pas meilleur ménager de votre personne que vous l'êtes de toute autre chose (VOIT. Lett. 119)

Un roi dont la prudence a de meilleurs objets Est meilleur ménager du sang de ses sujets (CORN. Cid, II, 7)

....Des moindres moments Bons ménagers furent nos deux amants (LA FONT. Gag.)

Mais violent dans ses désirs, Et grand ménager de soupirs (LA FONT. Fianc.)

Jamais homme plus doux [que Vauban], plus obligeant, mais respectueux, sans nulle politesse, et le plus avare ménager de la vie des hommes (SAINT-SIMON 116, 1)

3. S. f. Ménagère, servante qui a soin du ménage de quelqu'un.

Au milieu d'eux une femme d'un esprit et d'un sens profond, mais qui, enveloppée dans son extérieur de bonhomie et de simplicité, avait plutôt l'air de la ménagère que de la maîtresse de la maison (MARMONTEL Mém. IV)

Dans sa maturité sévère, Dans sa femme que chercha-t-il [Racine] ? Une très simple ménagère.... (DUCIS le Ménage des deux Corneille.)

Parmi le peuple, un mari appelle quelquefois ménagère sa femme.

Mais tu sais bien que notre ménagère Est la plus belle.... (LA FONT. Troq.)

Commissaire ! commissaire ! Colin bat sa ménagère (BÉRANG. Bon ménage.)

4. S. m. Ménager s'est dit autrefois pour chef de ménage.

Oubliez, oubliez l'amour de ce berger, Et prenez en son lieu quelque bon ménager (RACAN Berg. I, 3)

Ce sens a vieilli.

HISTORIQUE

XIVe s.Menagier de Paris, titre d'un livre cité souvent dans ce dictionnaire, et qui traite des choses du ménage.

XVe s.En ce temps.... feurent mis en escript tous les mesnaigers de Paris de tous estats, clercs, lais et religieux (JUVÉNAL DES URSINS Charles VI, 1415)

XVIe s.Il ne fut point du tout mauvais mesnager ny paresseuz de conserver son bien (AMYOT Péricl. 34)Le fait d'un bon mesnager, c'est de bien gouverner la maison (LA BOÉTIE 106)Une femme mesnagere entrant en une pauvre maison l'enrichit ; une despensiere ou faineante destruit la riche (O. DE SERRES 818)

ÉTYMOLOGIE

Ménage.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

2. MÉNAGER. Ajoutez : - REM. Au n° 4 en interprétant le vers de Racan : Et prenez en son lieu quelque bon ménager, le Dictionnaire dit que ménager signifiait anciennement chef de ménage ; c'est une erreur d'après M. Delboulle, Gloss. de la vallée d'Yères, le Havre, 1876, p. 223, par ce motif que ménager signifie encore aujourd'hui fermier en Normandie. Un bon ménager signifierait donc un bon fermier. Mais l'argument tiré de l'usage normand n'est pas décisif ; car Racan était né en Touraine.